L’Histoire du Clito

Rufus D’Ephèse 80-150

Médecin grec né aux environs de +80 à Éphèse et mort vers +150, qui vivait donc probablement du temps de Trajan (vers 110) 

Le traité de gynécologie de Rufus d’Ephèse, qui date du IIè siècle après J.-C., identifie déjà clairement le clitoris. Il lui a d’ailleurs donné son nom actuel.

Rufus n’ignorait pas non plus qu’il pouvait être le lieu d’un « attouchement lascif ».

Gallien aurait beaucoup emprunté à ce clinicien remarquable et auteur prolifique, mais dont l’œuvre est en grande partie perdue,

Realdo Colombo 1516-1559

Il enseigne la chirurgie à l’Université de Padoue en Italie et publie en 1559 un ouvrage intitulé «De re anatomica» dans lequel il décrit le «siège du plaisir féminin», «l’amour de Venus». 

Chirurgien, professeur, anatomiste italien revendique la découverte du clitoris (contesté par son contemporain Gabriele Fallopio), qu’il baptisa amor veneris «L’amour de Vénus» dans son ouvrage,

«De re anatomica libri», paru en 1560. Il est le premier à mettre en évidence le lien entre la sensibilité particulière du corps féminin et la présence du clitoris.

Par l’observation et le toucher, par l’expérience vécue, il dévoile une relation qui n’existait pas jusqu’alors entre le désir sexuel et le clitoris.

Gabriele Falloppio 1523-1562

Successeur de Realdo Colombo (qui donnera son nom aux trompes de Fallone) affirme qu’il était le premier à découvrir le clitoris en 1561.

Anatomiste et chirurgien italien de Padoue, il ne tarde pas à affirmer qu’il est le véritable révélateur de l’organe et lui donne le nom de Kleitoris.

Cependant, si Fallope souligne les ressemblances entre le corps du clitoris et celui de la verge dans ses

«Observationes anatomicae», il omet toutefois d’évoquer ses fonctions érogènes.

Le mot cleitoris apparaît en 1575 dans la langue française sous la plume d’Ambroise Paré dans la première édition de ses Œuvres. Il sera ensuite supprimé dans la réédition de 1585.

Le mot clitoris trouve probablement son origine dans le grec ancien κλειτορίς (kleitoris), peut-être dérivé du verbe κλείειν (kleiein), « fermer ».

En grec, clitoris signifie également « clé », « indiquant que les anciens anatomistes le considéraient comme la clé » de la sexualité féminine.

D’autres candidats grecs pour l’étymologie du mot incluent un nom signifiant « verrou » ou « crochet » ;

Un verbe signifiant « toucher ou titiller lascivement », « chatouiller » (un synonyme allemand du clitoris est der Kitzler, « le chatouilleur »), bien que ce verbe soit plus probablement dérivé de « clitoris » ; et un mot signifiant « flanc de colline ».

Hippocrate l’ancêtre des médecins pensait que la stimulation du clitoris augmentait la fertilité ce qui résultait à la rencontre des semences de l’homme et de la femme.

Bartolomeo Eustachi 1500-1574

Eustache pour les Français est un anatomiste, médecin et professeur à l’université La Sapienza de Rome, où il pratique des dissections.

Son nom restera associé à la « trompe » auditive décrite dans son Opuscula anatomica.

Dans cet opuscule publié en 1564, qui ne relate qu’une partie de ses recherches, il signale qu’il a fait graver 46 plaques de cuivre pour l’ouvrage qu’il projette de publier, mais qui ne verra jamais le jour – handicapé par une arthrite rhumatoïde, il meurt en 1574 sans avoir réalisé son projet.

Selon Choulant (1920 [1852], pp.200-204), il précise dans son De renibus (1563) que ces plaques ont été gravées en 1552.

C’est en tout cas cette date qui a été retenue par l’histoire des sciences.

George Ludwig Kobelt 1804-1857

Anatomiste allemand fait 1844 ce qui est probablement la première exploration détaillée de l’anatomie du clitoris interne. Il découvre que le clitoris est érectile tout comme le pénis et est reconnu pour avoir fourni une description complète et précise de la fonction du clitoris dans son œuvre « De l’appareil génital des deux sexes chez l’espèce humaine et quelques mammifères. » Aucun autre scientifique de l’époque n’écrira à ce sujet.

Gray’s Anatomy 1901

Le clitoris apparaît dans l’édition de l’année du Gray’s Anatomy, mais il sera le grand absent de l’édition de 1948.

La découverte du processus de la fécondation de l’ovule par le spermatozoïde sonnera définitivement le glas pour le clitoris : il est décrété inutile pour la procréation et perd donc tout intérêt.

Devenu siège évident du plaisir, le clitoris n’en est pas pour autant condamné par l’Eglise de la Renaissance. « Jusqu’à environ 1830, on pensait que la fécondation était possible par une double semence, précise Francesco Bianchi-Demicheli.

On parlait du frisson à l’époque, pour ne pas utiliser le terme plaisir, mais on l’acceptait car on pensait que cela était nécessaire pour que la femme tombe enceinte.

Lorsque l’on a découvert que l’ovulation était spontanée, ce plaisir est devenu superflu, inutile, voire stigmatisé.

C’est sans doute l’une des raisons qui explique pourquoi les planches anatomiques sont toujours incomplètes en 2017.

En effet au tournant du XIXe siècle que tout bascule. Le clitoris, qui perd sa fonction utile à la procréation, devient tabou sous la pression morale du protestantisme. Certains médecins préconisent l’excision pour traiter l’épilepsie, la catalepsie ou la nymphomanie.

La pratique est largement répandue en Allemagne pour lutter contre l’onanisme, la masturbation étant alors considérée comme l’une des causes principales de l’hystérie féminine.

Sigmund Freud passe également par-là, lui qui, vers 1930, dénonce le plaisir clitoridien comme le fruit d’une névrose propre aux femmes immatures et déviantes.

Renaissance : Âge d’or de l’anatomie… et du clitoris

Au sortir du Moyen Âge, on ne connaît pas bien le clitoris. À cette époque, on pense que lorsqu’une femme a un orgasme, elle émet un liquide similaire au sperme. De là est née l’idée que plus les femmes éprouvaient du plaisir, plus les chances de grossesse étaient importantes. Tout ce qui permet le plaisir féminin est donc vivement encouragé, y compris la stimulation du clitoris.

Sigmund Freud 1856-1939

En 1905, médecin neurologue de Vienne, publie ses Trois essais sur la théorie sexuelle. Il y infantilise une sexualité clitoridienne non organisée. Selon lui, seul un orgasme vaginal serait digne d’une sexualité adulte et structurée.

La même année, le fondateur de la psychanalyse publie trois essais sur la théorie sexuelle ou il y décrit les orgasmes comme un symptôme de l’immaturité sexuelle des femmes.

Un orgasme féminin ‘’sain’’ devrait être vaginal et non clitoridien. Il croyait tellement en sa théorie qu’il n’a pas pensé que le clitoris méritait une étude plus approfondie, le jugeant inutile.

La petite fille « remarque le grand pénis bien visible d’un frère ou d’un camarade de jeu, le reconnaît tout de suite comme la réplique supérieure de son propre petit organe caché et, dès lors, est victime de l’envie du pénis », décrit Freud dans Introduction à la psychanalyse (1922).

«Humiliée», «dégoûtée», la petite fille doit abandonner son clitoris pour se tourner vers son vagin et par là, «vers de nouvelles voies qui conduisent au développement de la féminité».

Princess Marie Bonnaparte 1882-1962

En 1946, Marie Bonaparte, freudienne passionnée, se fait déplacer chirurgicalement le clitoris afin qu’il soit plus facilement excité lors du coït, qui, selon Freud, était le seul acte valable de plaisir : elle n’en a cependant jamais été pleinement satisfaite.

Elle écrit d’ailleurs, sous le pseudonyme de A.E. Narjani, un article intitulé « Considérations sur les causes anatomiques de la frigidité chez la femme », dans lequel elle explique la frigidité féminine par une fixation clitoridienne induite par une distance trop grande entre le clitoris et le vagin.

Elle appuie sa thèse par la mesure de la distance du clitoris et du méat urétral sur une population de 200 femmes, prises au hasard.